Yawatani

A l'occasion de la tenue de la conférence internationale des ministres africains du commerce organisée début Avril par l'OMC à Marrackech, Al Huffington Post a interviewé Pascal Lamy ancien directeur de l'OMC sur le rôle et la place de l'économie marocaine dans le payasage du commerce mondial.   

HuffPost Maroc: L’OMC a récemment fêté ses 20 ans à Marrakech. En deux décennies, comment ont évolué les échanges commerciaux entre les pays africains et le reste du monde?

Pascal Lamy: Les échanges entre l’Afrique et le reste du monde ont augmenté, un peu moins vite que la moyenne, parce que l’intégration asiatique a eu des effets importants sur le volume des échanges. Mais l’Afrique a participé et bénéficié de ce processus d’ouverture des échanges, même si pour un certain nombre de raisons, les croissances sont moins fortes qu’en Asie. Il reste à l’Afrique à continuer ce parcours d’intégration dans l’économie internationale. Cela passe par une amélioration de l’offre, des systèmes logistiques, et par l’intégration régionale: c’est le chemin normal vers le marché global et là, il y a encore beaucoup à faire.

A quels défis nouveaux les pays émergents, et notamment africains, doivent-ils faire face dans la prochaine décennie?

L’essentiel dans l’avenir, c’est de développer des avantages comparatifs, notamment sur la logistique qui est souvent très discriminante. L’avenir se jouera surtout dans la capacité de ces pays à "matcher" avec les standards internationaux de précaution et de qualité en termes de normes, de santé et de sécurité, parce que cette demande de précaution augmente vite dans les pays développés qui s’enrichissent, et elle est aussi souvent revendiquée par la classe moyenne, y compris dans les pays émergents comme la Chine ou le Brésil. Je pense que c’est dans cette direction là qu’il faut regarder.

Le Maroc est la première destination des capital-investisseurs en Afrique du Nord. Qu’est-ce qui explique cet attrait pour le royaume auprès des investisseurs étrangers?

Si l’on compare le Maroc avec l’Algérie ou la Tunisie, cela me paraît quand même assez évident. Le royaume a une trajectoire économique tout à fait convaincante depuis dix ou vingt ans, même s’il serait mieux pour lui d’avoir un taux de croissance de 6% plutôt que de 4%. C’est un pays qui bénéficie aussi de plus de stabilité politique, géopolitique et géoéconomique que ses voisins.

Le Maroc a correctement ouvert ses échanges et fourni les conditions nécessaires à ceux qui veulent y investir pour produire des biens et des services, même si on peut encore faire mieux. Je crois surtout que ce qui aujourd’hui peut attirer des investisseurs au Maroc, ce sont les perspectives de développement du pays sur le marché africain, et on le voit dans les secteurs comme la banque, les télécommunications ou le transport aérien: il y a des perspectives mais surtout des résultats assez impressionnants depuis dix ans.

Le Maroc investit de plus en plus dans les autres pays africains. Quel regard portez-vous sur cette stratégie sud-sud opérée par le Maroc?

Le Maroc possède un certain nombre d’avantages comparatifs, il est en tête du peloton en termes d’émergence, et donc il est normal qu’il développe ces avantages là où il y a des perspectives de demande, notamment dans le secteur de la banque. Le Maroc a acquis un savoir-faire qu’il doit développer en investissant dans l’éducation, l’information et tout ce qui concerne l’économie de la connaissance. Je pense que c’est la bonne direction à prendre.

Cela se fait-il au détriment de ses relations avec les pays du nord de la Méditerranée?

Non, car si vous faites quelque chose mieux que moi et que je fais quelque chose mieux que vous, on a intérêt à échanger. C’est une stratégie "win-win": chacun va bénéficier du savoir-faire de l’autre. Ce n’est pas un jeu à somme nulle pour tout le monde. Contrairement à ce que beaucoup de personnes pensent, tout le monde peut augmenter ses exportations à condition que tout le monde augmente ses importations.

L’économie tunisienne a beaucoup pâti du "printemps arabe". Dans ce contexte, le Maroc est-il voué à devenir le moteur économique du Maghreb?

Cela serait vrai s’il y avait un Maghreb: c’est un concept géographique intéressant, mais ce n’est, hélas de mon point de vue, un concept ni politique ni économique pertinent. Il y a un coût du "non Maghreb" pour les économies et les populations de cette région. Ce sont des problèmes très difficiles qui subsistent et qui n’ont pas pu être surmontés jusqu’à présent.

Ajouter un Commentaire

Les points de vues exprimés dans les commentaires reflètent ceux de leurs auteurs mais ne reflètent pas nécessairement le point de vue officiel de Yawatani.com qui, par conséquent, ne pourra en être tenu responsable.
De plus, Yawatani.com se réserve le droit de supprimer tout commentaire qu'il jurera non approprié.


Code de sécurité
Rafraîchir

Ecouter la radioNewsletter

Horaires des prières

Pays:
Ville:
Autres options
Année:
Mois:
Latitude:
Longitude:
Time Zone:
DST:
Méthode:
Format heure:

Afficher le mois