Yawatani

Le gouvernement a réaffirmé sa volonté de lutter contre l’islam radical à la suite des attentats du 13 novembre, perpétrés par et avec la complicité de Français radicalisés sur le territoire.

Par la voix du Conseil français du culte musulman (CFCM), le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve a proposé, mardi 24 novembre, la mise en place d’une « habilitation » des imams, sorte de certificat qui restera facultatif. Cette annonce prolonge les mesures engagées après les attentats de janvier. Mais, du fait des règles de la laïcité, l’Etat est limité à des dispositions symboliques qui ne peuvent être portées que par les instances dites représentatives des musulmans de France.

1. Qu’est-ce qu’un imam ?

Un imam est littéralement un « guide » de la prière. Plusieurs tâches lui reviennent : conduire les prières quotidiennes, assurer le prêche du vendredi, répondre aux interrogations spirituelles des fidèles. Une mosquée peut accueillir plusieurs imams et un imam collaborer avec différents lieux de culte. L’imam n’est donc pas le responsable de la mosquée, ni l’équivalent d’un prêtre catholique, mais se rapproche un peu d’un pasteur protestant. Les imams sont souvent bénévoles et exercent une profession par ailleurs. Les mosquées sont généralement gérées par des associations, elles-mêmes représentées par un président.

2. Comment est-il nommé ?

C’est généralement le responsable de l’association des fidèles qui désigne le ou les imams. Ils sont traditionnellement choisis pour leur érudition, c’est-à-dire leur connaissance des textes saints. Il n’existe ni âge minimum ni « diplôme » requis. Une femme peut également prétendre à l’imamat mais elle ne peut guider la prière que devant une assemblée de femmes.

L’absence de statut reconnu place les imams dans une situation « précaire » face au responsable des mosquées, estime le spécialiste de l’islam Bernard Godard, ancien du bureau des cultes du ministère de l’intérieur. Ce dernier invite à « créer une relation saine et normalisée entre le magistère théologique et les administrateurs de mosquées. Cela passe par la création d’un imamat, c’est-à-dire un corps reconnu des imams, comme ce qui existe pour les rabbins [réunis sous l’autorité morale du grand rabbin de France] ».

3. Qu’en est-il des imams venant de l’étranger ?

Certains imams sont envoyés par des pays étrangers, essentiellement la Turquie, l’Algérie et dans une moindre mesure le Maroc. On parle d’imams détachés. En juin, Bernard Cazeneuve se disait en discussion avec les pays concernés pour rendre obligatoire une formation d’un an à la laïcité pour les imams venant exercer en France. Ce projet a vu le jour pour les imams détachés algériens depuis quelques semaines, avance le ministère.

4. Qui sont les aumôniers de prison et qui les gère ?

Les aumôniers musulmans qui interviennent en prison sont des volontaires. C’est le CFCM qui les désigne, puis l’administration pénitentiaire doit valider ces nominations et elle s’attache à ce que les aumôniers aient un certain niveau de français.

5. Quelles sont les formations existantes ?

Il n’y a pas de formation dédiée ni obligatoire pour devenir imam. Et l’offre de formation est mince. En France, les mosquées ou les associations cultuelles enseignent la théologie musulmane, essentiellement à destination des enfants. Des études de théologie plus poussées sont proposées par quelques instituts privés d’études supérieures : l’institut Razali de la Grande mosquée de Paris, l’Institut européen des sciences humaines (IESH) à Saint-Denis (agréé par l’académie de Créteil) et Château-Chinon dans la Nièvre.

Certains musulmans choisissent de suivre des cursus à l’étranger dans des universités réputées, comme celles d’Al-Azhar au Caire et celle de la Zitouna à Tunis. Quelques imams suivent des cursus universitaires, qui ne sont pas dédiés à l’imamat, mais apportent un éclairage sociologique, historique et culturel sur l’imbrication de la religion dans la République française.

6. Quelle est la marge de manœuvre de l’Etat concernant l’islam ?

La loi de 1905, qui définit la séparation de l’église et de l’Etat, empêche ce dernier d’intervenir dans toute organisation de culte ou de définir des contenus idéologiques. L’Etat agit donc par l’intermédiaire des instances représentatives.

7. Quelles sont les institutions représentatives des musulmans en France ?

Ce ne sont pas des autorités religieuses, mais avant tout une création politique pour faire le lien entre un gouvernement qui ne peut interférer dans les questions religieuses et une communauté qui n’a, intrinsèquement, pas de représentant puisque l’islam sunnite, majoritaire en France, ne s’organise pas autour d’un clergé comparable à celui de l’église catholique.

Pierre Joxe avait fait le Corif (Conseil de réflexion sur l’islam de France) en 1990, Nicolas Sarkozy a fondé le Conseil français du culte musulman (CFCM) en 2003. Bernard Cazeneuve a lancé en mars 2015 l’idée d’une « instance de dialogue », qui s’est réunie pour la première fois le 15 juin, réunissant quelque cent cinquante représentants de fédérations et de mosquées, des théologiens ou des associatifs. Elle est définie par le ministère comme un « mécanisme de consultation régulier » des musulmans sur les affaires qui ont trait à leur culte et complète ainsi l’action du CFCM.

« C’est une tentative d’élargir la représentativité à la société civile musulmane, approuve Bernard Godard. Elle part du constat tout à fait sensé que le CFCM n’a pas complètement joué son rôle. » Le ministère de l’intérieur considère en effet que le Conseil ne représente que 30 % à 40 % des mosquées françaises.

En cas de « crise » c’est cependant le CFCM, plus ancré institutionnellement, qui est appelé à la rescousse. On a encore pu le voir après les attentats du 13 novembre avec l’annonce d’une « certification » des imams et la publication d’un prêche commun, destiné à être lu dans toutes les mosquées lors de la grande prière du vendredi ayant suivi le drame.

8. Qu’est-ce qui a changé depuis janvier ?

Après les attentats de Charlie Hebdo et de l’Hyper Casher, tout en appelant à ne pas faire d’amalgames ou de raccourcis entre islam et islamisme, religion et terrorisme, le gouvernement avait réaffirmé l’importance de « réformer l’islam de France ». Avec deux axes : la représentation de l’islam et la formation des imams.

L’« instance de dialogue », créée en juin, est ainsi appelée à se réunir deux fois par an. Une étude sur l’islam de France a été confiée à l’Université de Strasbourg pour permettre de cerner une réalité multiple.

Concernant la formation des imams, l’offre de formations universitaires à la laïcité a continué de croître. Onze universités délivrent désormais les diplômes universitaires, contre six au début de l’année. Ils sont désormais obligatoires pour les imams détachés algériens.

9. Décerner des « certifications » aux imams, qu’est-ce que cela implique ?

Le projet d’une « habilitation » des imams, annoncé par Anouar Kbibech le 24 novembre après une réunion avec Bernard Cazeneuve, prévoit une vérification des connaissances théologiques et de l’adhésion aux valeurs républicaines, ainsi que la signature d’une « charte de l’imam » en cours d’élaboration. Cette validation serait décernée par le CFCM qui disposerait également d’« une possibilité de retrait » de ce titre. Il ne sera cependant pas obligatoire pour recruter un imam. Mais « retirer l’habilitation permettrait de mettre les mosquées devant leurs responsabilités », considère Anouar Kbibech, le président du CFCM. Aucun calendrier n’a encore été annoncé.

Bernard Godard doute que le CFCM, qui « n’est pas une autorité théologique », puisse octroyer lui-même cette habilitation. Mais « le climat est tel que les responsables [de mosquées] vont peut-être être amenés à aller chercher ces habilitations pour leurs imams », ajoute-t-il.

Anouar Kbibech a également confirmé la mise en place prochaine d’un « conseil religieux », chargé d’« élaborer [un] discours alternatif » afin de « démonter sur le plan théologique tout l’argumentaire utilisé par les organisations terroristes et djihadistes pour embrigader nos jeunes ».

10. Réformer le cadre de l’islam en France permettra-t-il de lutter contre la radicalisation islamiste ?

Après son entretien avec Anouar Kbibech, le 24 novembre, le ministre de l’intérieur a souligné la « volonté du gouvernement de tout faire pour que les prêcheurs de haine » soient mis « hors d’état de nuire ». La multiplication des perquisitions et assignations à résidence dans les milieux salafistes ne doit pourtant pas faire oublier que le mécanisme d’endoctrinement est beaucoup plus complexe : « La mosquée de Lunel [près de Montpellier] en est emblématique, relève Bernard Godard. C’est un lieu qui a pu servir au recrutement djihadiste et pourtant ce n’est pas une mosquée salafiste et l’imam de la mosquée ne véhiculait pas un discours guerrier. »

Les facteurs d’endoctrinement sont aussi à chercher au-delà de la sphère religieuse. Pour le politologue Olivier Roy, l’islam n’est qu’un prétexte « opportuniste » de la violence des djihadistes français : « Les terroristes, souligne-t-il dans une tribune parue dans Le Monde, ne sont (…) pas l’expression d’une radicalisation de la population musulmane, mais reflètent une révolte générationnelle qui touche une catégorie précise de jeunes. »


lemonde.fr/

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    Abû Hurayra rapporte : le Prophète ( paix et salut sur lui) dit : « Il y a des Anges de Dieu qui font le tour des voies et des chemins sur terre pour chercher les assemblées de Dhikr (invocations de Dieu). Dés qu’ils trouvent une assemblée de Dhikr, ils s’appellent et enveloppent de leurs ailes cette assemblée jusqu’au ciel inférieur.

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