Yawatani

Le Conseil d’Etat a invalidé les arrêtés anti-burkini.  A priori, la vive polémique ayant scindé le pays en deux camps opposés devrait prendre fin. La réaction de la classe politique montre qu’on en entendra encore parler quelque temps, au moins jusqu’aux présidentielles prochaines.

A ce stade de la controverse, ces quelques éléments me semblent importants à retenir pour sortir « indemnes »  de cette affaire et pour éviter de tomber dans le piège d’une polémique similaire à venir.

Le burkini n’est pas une tenue islamique

Le burkini est une création récente relevant de l’initiative personnelle d’une australienne de confession musulmane qui a souhaité concilier sa foi et son amour du sport. En cela, cette tenue de bain n’est pas une tenue prescrite par l’Islam. Par ailleurs, il n’existe pas de tenue vestimentaire « islamique » en tant que telle, ni pour les hommes ni pour les femmes. A l’instar des deux autres religions monothéistes, l’islam invite les croyant-e-s à faire preuve de pudeur dans leur attitude vis à vis de leur créateur, mais aussi en société, et cela passe entre autres, mais pas uniquement, par la pudeur du regard et du corps. Il ne prescrit pas pour autant de tenue vestimentaire précise, et encore moins exclusivement aux femmes, comme certaines lectures littéralistes tendent à nous le faire croire.

 Le burkini est moderne et occidental

Les françaises de confession musulmane qui choisissent de porter cette tenue de bain, se comptant par dizaines voire par centaines tout au plus, sont souvent animées par leur désir de concilier leur spiritualité et leur modernité. En réalité, loin d’être un signe « archaïque », d’« asservissement » des musulmanes comme il a été décrit, le burkini est une création moderne, occidentale et révélatrice de l’accès progressif des françaises musulman-e-s au tourisme et aux loisirs. Un indice de mobilité et de mixité sociales dont on devrait se réjouir à priori, que l’on soit pour ou contre son port.

 Les arrêtés anti burkini constituent une dérive liberticide

Dans les faits, la majorité des musulmanes qui passent leurs vacances au bord de la mer nagent en maillot de bain. Une infime partie de ces femmes  fait le choix de s’en vêtir pour profiter de leurs vacances tout en respectant au mieux leurs convictions religieuses. Avec sa décision, le Conseil d’Etat vient de rappeler que le contexte post-attentas ne peut pas justifier, à lui seul, l’atteinte illégale à la liberté religieuse d’une partie de la population en la stigmatisant.

 Les islamistes radicaux sont eux aussi anti burkini

L’affiliation de cette tenue de bain à l’islamisme radical est non fondée. Les partisans de cette idéologie radicale sont obsédés par l’interdiction totale de l’accès des femmes à l’espace public. Pour eux, les femmes n’ont tout simplement pas à se rendre à la plage, encore moins en tenue moulante telle que le buriki. Par contre, il est fort probable qu’ils se servent des photos et des vidéos des musulmanes forcées de se déshabiller partiellement ou de quitter la plage qui ont fait le tour du monde pour justifier leur animosité envers la France. Il incombe aux musulman-e-s de ne pas céder à la tentation victimaire et aux non musulman-e-s à la tentation raciste et islamophobe ambiante, pour éviter l’embrasement de la situation.

 La légitime défense ne doit plus être la seule réponse des musulman-e-s au débat

Pour contrer ces discriminations, le recours au droit ne doit plus être la seule réponse des musulman-e-s. La mobilisation des citoyens et des organisations musulmanes pour dénoncer ces réglementations d’exception est nécessaire et salutaire, mais elle ne suffit plus.  Ils doivent admettre que dans un contexte d’état d’urgence, la plaie des attentats ayant endeuillé le pays est encore ouverte.  Dans ce contexte où la population est encore en proie à l’émotion, à la peur, à l’indignation et aux amalgames, il faut appeler à la responsabilité et à l’apaisement des tensions.

 Une alternative théologique endogène doit être osée au sujet des femmes et du voile

Bien que le burkini ne soit pas une tenue « islamique », une alternative théologique globale doit rapidement être proposée pour remédier au malaise grandissant des femmes voilées, principalement en France où elles sont de plus en plus exclues. En plus de les défendre lorsqu’elles sont discriminées, les théologien-ne-s musulman-e-s  doivent favoriser l’émergence d’autres interprétations des Textes relatifs aux femmes en Islam en général et au voile en particulier. Ces interprétations existent déjà, mais elles sont minorisées et volontairement écartées au profit d’une lecture faisant du voile, voire de la burqua, une prescription « sacrée ».  En osant remettre le monopole de cette lecture en question, nos spécialistes rendront, à coup sûr, un grand service à l’Islam et aux musulmanes du monde entier. Les mosquées, les instituts de formation théologique et les associations musulmanes doivent répandre ces lectures alternatives auprès des croyant-e-s qui les fréquentent. Averties des différents avis sur cette question, les musulmanes choisiront, en leur âme et conscience, l’avis qui leur semble le plus adéquat au vu de leur personnalité, de leurs aspirations et de leur contexte. Leur donner le choix en les déculpabilisant, c’est arrêter leur infantilisation qui a duré beaucoup trop longtemps et c’est aussi leur permettre de ne plus devoir choisir entre leur foi et leurs aspirations de femmes modernes.

La discrétion, une valeur islamique fondamentale

N’en déplaise à certain-e-s, la retenue et la discrétion sont des valeurs intrinsèques à l’Islam. Leur but n’est pas de nous invisibiliser ou de nous inciter à « raser les murs » comme rêveraient de nous voir faire certain-e-s. Au contraire,  elles nous invitent à maîtriser notre égo, plus enclin à la riposte qu’à la sagesse dans les moments de tensiosn extrêmes. Elles nous incitent à vivre paisiblement notre foi , à faire preuve de miséricorde même face à l’adversité et à réaliser l’attribut divin Assalam, Paix, de la même racine que le mot Islam.

Par Naila  El jaouhari pour yawatani.com

 

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