Yawatani

 "Réconcilier le livre, le produit culturel et le grand public", tel est l'objectif de la 23e édition du Salon international de l'édition et du livre (SIEL), qui se poursuit à Casablanca jusqu'au 19 février. 

Le "grand public" et le livre sont-ils à ce point fâchés que le ministère de la Culture en vient à définir pour objectif le terme de réconciliation? Il faut dire que les Marocains lisent peu, voire quasiment pas, comme l'indiquent les récentes enquêtes menées à ce sujet. 

Celle de l'association Racines, rendue publique en novembre dernier, dresse une situation alarmante. Selon l'enquête réalisée par Aicha Nouri et Mohamed Sammouni,sous la direction d'Aadel Essaadani, 64.3 % des Marocains n’ont acheté aucun livre au cours des 12 mois qui ont précédé l’enquête. Durant la même période et toujours selon la même enquête, 84.5% des Marocains ne se sont inscrits dans aucune bibliothèque ou médiathèque. 

"Le livre est en souffrance" 

Une situation que dénonce l'auteure marocaine Kenza Sefrioui, qui vient de publier "Le livre à l'épreuve", un livre-enquête sous-titré "Les failles de la chaîne au Maroc" et paru aux éditions "En toutes lettres". "Le livre est en souffrance au Maroc parce qu'on a structurellement une situation qui ne met pas le livre au service des gens", regrette Kenza Sefrioui dans une déclaration au HuffPost Maroc. "Nous n'avons pas plus de 600.000 bibliothèques publiques au Maroc, un pays de plus de 34 millions d'habitants", poursuit-elle.

"Nos meilleures plumes partent publier à l'étranger"

Pour Aadel Essaadani, président de l'association Racines, si les Marocains lisent si peu, c'est parce qu'ils n'ont pas été initiés à la lecture dès leur plus jeune âge. "C'est simple, nous ne leur faisons pas aimer le livre à l'école. C'est une question de société. Au Maroc, contrairement à d'autres pays, on n'a pas le réflexe de faire lire un livre à son enfant et l'école en est grande partie responsable. Or si on ne commence pas ce travail à l'école, on risque de ne jamais ressentir le besoin de lire", déclare-t-il au HuffPost Maroc.

Kenza Sefrioui est tout aussi alarmiste. Pour celle qui se considère à la base comme critique littéraire, "il n'y a absolument rien qui permet d'initier une dynamique de lecture publique au Maroc, alors que nous avons des plumes". "Nos meilleures plumes partent publier à l'étranger, que ce soit au Liban ou en Égypte pour les arabophones, ou à Paris, pour les francophones. C'est dommage car du coup, ces livres arrivent importés. Ils sont alors chers, et ça ne contribue pas à ce qu'un dialogue s'établisse entre nos écrivains, nos penseurs et les gens qui ont envie de lire, de rêver, de comprendre", déplore-t-elle. 

Une seule solution pour changer la donne et pousser les Marocains à lire : "Faire pression sur nos pouvoirs publics, qui ont la responsabilité de mettre en place des infrastructures qui concernent tout le monde", insiste Kenza Sefrioui. 

Besoin d'une "politique d'ampleur"

Selon l'éditrice et auteure, la majorité des initiatives qui existent aujourd'hui sont l'oeuvre de la société civile: "C'est l'État qui a les moyens de mener une politique d'ampleur et de pallier les déséquilibres, car aujourd'hui le livre est complètement concentré sur l'axe Rabat-Casa. Il y a un peu de dynamisme dans le nord, mais les villes universitaires n'ont rien. Je ne vous parle même pas des campagnes. On a un pays qui est complètement sinistré culturellement". 

"Les autorités doivent soutenir davantage l'industrie du livre, en subventionnant des livres pour qu'ils soient à la portée de tous", indique pour sa part Aadel Essaadani. 

Pour un rayonnement local

Après le SIEL, le Maroc sera en mars l'invité d'honneur du Salon international du livre de Paris. Une aubaine pour les éditeurs et auteurs marocains qui pourront présenter leur travail à un public plus large. Mais pour Kenza Sefrioui, ce n'est pas forcement une bonne chose pour les Marocains. 

"C'est génial, mais combien sommes-nous à nous en réjouir dans notre pays? C'est une excellente nouvelle en termes de diplomatie culturelle, de rayonnement et de reconnaissance de nos talents, et il y en a, mais le problème est de savoir qui cela va concerner", nuance l'éditrice.

Selon une étude du Haut commissariat au plan (HCP), publiée en 2014, les Marocains ne consacrent que deux minutes de leur temps à la lecture. Des chiffres presque aussi pessimistes que ceux d'une autre étude, récemment menée par la Fondation Mohammed Bin Rashid Al Maktoum, en partenariat avec le PNUD, et parue en 2016, qui prend pour sa part en compte la lecture numérique. Ainsi, selon l'"Arab Reading Index 2016", les Marocains consacrent à la lecture un peu moins de 60 heures par an, soit moins de 10 minutes par jour.

lire la suite sur huffspot

Ajouter un Commentaire

Les points de vues exprimés dans les commentaires reflètent ceux de leurs auteurs mais ne reflètent pas nécessairement le point de vue officiel de Yawatani.com qui, par conséquent, ne pourra en être tenu responsable.
De plus, Yawatani.com se réserve le droit de supprimer tout commentaire qu'il jurera non approprié.


Code de sécurité
Rafraîchir

Ecouter la radioNewsletter

Horaires des prières

Pays:
Ville:
Autres options
Année:
Mois:
Latitude:
Longitude:
Time Zone:
DST:
Méthode:
Format heure:

Afficher le mois