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- Publication : 5 mai 2010
C’est un livre remarquable, riche et fascinant sur une partie de l’Histoire du Maroc et ce, malgré sa brièveté. Sur la lignée des historiens français du Maroc tels que Louis Miège, Benoît Méchin, Robert Barrat et d’autres, Pierre Vermeren, ancien professeur au lycée Descartes de Rabat, a réussi par son dernier repère sur le Maroc indépendant à cumuler objectivement des faits historiques et de brèves biographies que tout Marocain de la génération montante doit connaître et assimiler pour apprécier et juger le présent et le futur de notre pays…
Ainsi, l’auteur se base sur de bons repères bibliographiques qui facilitent la tâche à nos étudiants en histoire et à nos chercheurs pour réécrire une histoire sans ricochets que tente vainement de le faire un Institut royal récemment créé par le professeur Akabli et financé par les Habous ….
Si l’auteur est assez bref dans la présentation de cette période critique de l’avenir du Maroc après le Protectorat français, c’est qu’il est, sans le contester, précis et clair, mettant le lecteur marocain ou étranger tout à fait à son aise.
Quand il évoque le nationalisme marocain qui a mis fin au protectorat français, il lui trouve deux sources majeures d’inspiration , à savoir le retour aux sources de l’Islam pour faire renaître le Maroc jugé décadent .Ses penseurs principaux étaient surtout de l’Université religieuse La Quaraouiyine de Fès , tels que Cheikh Mohammed Belarbi Alaoui, Allal El Fassi, Hachemi Filali, Mokhtar Soussi…. La seconde source est celle du courant «Jeunes Marocains», sortant des universités françaises pour utiliser et retourner contre la colonisation les armes et les principes dits universels. C’est la petite communauté des étudiants de Paris comme par exemple Ahmed Balafredj, Mohammed Belhassan El Ouazzani, M’Hammed Douiri… Les événements de 1930 et 1944 favorisèrent la jonction des deux courants dans l’établissement d’abord d’une demande de réformes et ensuite la revendication ensuite de l’indépendance…
Pierre Vermeren n’omet pas du tout de préciser que grâce aux nationalistes, une solide bourgeoisie urbaine, que le sultanat est devenu une monarchie populaire. Grâce aussi aux assurances données par Ahmed Balafredj et Allal El Fassi, le peuple marocain organisa le 8 mai 1934 au jeune Sultan Sidi Mohammed Ben Youssef la première fête du trône devenue populaire. Cette alliance inattendue entre nationalistes et Sultanat fut scellée jusqu’à l’indépendance. L’auteur n’hé- site pas à affirmer que c’est l’Istiqlal qui fit du Sultan un roi, titre qu’il prit officiellement le 15 août 1957…
Dans l’ensemble , l’ouvrage est entaillé d’objectivité sur la description des périodes subies par la monarchie marocaine qui unifia le peuple pour se soulever contre l’occupation française, occupation qui dura exactement Quarante quatre ans…
De l’exil à Madagascar du Sultan Mohammed Ben Youssef qui n’avait pas approuvé les réformes imposées par le Protectorat à la création de la Résistance et de l’Armée de Libération, les événements politiques se précipitèrent. La France, craignant pour ses intérêts agricoles, industriels, commerciaux, se dépêcha de ramener de son exil le Sultan devenu populaire. C’est grâce à cette Résistance armée que le Maroc se libéra de la tutelle de la France et prit son destin en ses propres, mains sous le joug de la dynastie des Alaouites….
D’après Vermeren, qui s’éloigne bien des thèses marocaines de Laroui et de Boutaleb, assez subjectives, une véritable partie d’échecs s’est jouée entre le palais et l’Istiqlal, candidat au rôle de parti-Etat et c’est la bonne fortune de l’histoire qui sourit à Mohammed V, fin politique, jusqu’à sa mort avec sa mainmise totale sur le pouvoir…
Dans sa description du régime du Roi Hassan II, l’auteur clame que « la révolution du roi et du peuple entamée en
Mohammed VI, qui lui succéda tente avec sa nouvelle politique réformiste de désamorcer la contagion islamiste. D’un autre côté, Il est assailli par les partis politiques pour le partage du pouvoir. Tous ces points parcourent ce livre qui, à mon avis, est superbe, remarquable, riche, retraçant une partie de l’histoire marocaine malgré sa brièveté. C’est un véritable bonheur de lire ce petit dictionnaire aux multiples interprétations possibles par les historiens marocains, puisqu’il s’agit d’un livre écrit par un Français...
Saluons donc ce livre brillant d’un ex-coopérant volontaire écrivant l’Histoire de l’Afrique du Nord et qui est aussi l’auteur de livres comme: «Le Maroc en transition», «La formation des élites marocaines et tunisiennes», «des Nationalistes aux Islamistes 1920-2000», « Maghreb , la démocratie impossible…».
Par Abderrahim OUARDIGHI, Historien
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