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Depuis 2003, le Maroc fête chaque année le 10 août les Marocains résidant à l'étranger (MRE). En 2015, cette journée est plus particulièrement consacrée aux femmes marocaines émigrées.

La journée nationale des MRE est devenue une occasion rituelle de fêter les MRE pour renforcer les liens de la communauté marocaine à l'étranger avec la mère patrie, le Maroc. Elle est toujours marquée par des espaces de débats, parfois houleux, auxquels prennent part les Marocains du monde et les acteurs économiques et sociaux. Elle constitue également une occasion pour dresser le bilan des réalisations par rapport aux attentes des MRE, et là c'est aussi quelquefois un débat houleux.

Dans le but d'assurer une participation des membres de la communauté des MRE, le Ministère chargé des Marocains Résidant à l'Etranger et des Affaires de la Migration annonce que les célébrations de cette année seront organisées dans les différentes régions, préfectures et provinces du Royaume en présence de responsables des administrations et établissements publics et des collectivités territoriales.

2015 : Honneur aux femmes marocaines résidant à l'étranger

En 2015, la journée des MRE est célébrée sous le thème des femmes marocaines émigrées. Le choix de ce thème est pertinent, car trop souvent on ne voit que les aspects masculins de l'émigration marocaine. Certes elle a été pendant longtemps le fait des hommes qui venaient chercher en Europe ou en Amérique du Nord un travail et des moyens de subsistance qu'ils ne pouvaient pas trouver dans leur pays d'origine. Mais, depuis le milieu des années 1970, avec la politique de regroupement familial la tendance s'est inversée.

L'appel de main d'œuvre dans les années 50-70 a d'abord ramené des bras masculins dans les usines d'Europe. Mais si l'immigration marocaine a été, à l'origine, essentiellement masculine, elle débouche assez tôt sur un ancrage familial, encouragé en cela par la politique du regroupement familial mis en place dans les différents pays européens (en France, le 23 avril 1976).

La promotion du regroupement familial transforme le processus migratoire, ouvert par les besoins en main-d'œuvre de l'économie, en espace de vie en famille. Et, dans ce cadre-là, les femmes marocaines de l'étranger permettent la préservation des valeurs et traditions de leur pays d'origine. Mais cette fonction sera de plus en plus difficile à maintenir, d'autant plus que l'immigration marocaine en Europe change de caractéristiques à partir des années 1980. Le ralentissement de la croissance économique conduit les gouvernements d'abord à restreindre l'immigration au regroupement familial et aux demandes spécifiques émanant d'employeurs, puis à modifier les conditions d'entrée.

Aujourd'hui, 56 % des nouveaux immigrés marocains en France sont des femmes. Ce qui était à une époque une spécificité masculine est devenue en trente ans une caractéristique à dominante féminine. Et les nouvelles MRE d'aujourd'hui sont davantage formées et autonomes que celles des années 1980 – 2000. Ce rapide et trop synthétique rappel de l'évolution de l'immigration des Marocaines montre, si besoin en était, que le thème choisi pour 2015 est pertinent, d'actualité, mais aussi difficile à aborder car les besoins et les attentes ne sont pas les mêmes en fonction des générations.

Les femmes immigrées de la première génération atteignent aujourd'hui l'âge de la retraite. Elles ne projetaient pas de terminer leurs vieux jours en France ou en Belgique ou ailleurs, mais leurs enfants ont grandi dans le pays d'accueil et sont devenus eux-mêmes parents. Les premières générations sont maintenant grands-parents voire arrière-grands-parents. Leurs attaches sont en France ou en Belgique, même si le cœur reste attaché au pays d'origine. Les plus jeunes des Marocaines immigrées ont été formées, et bien formées à un haut niveau, dans le contexte de la mondialisation. Leur rapport au pays d'origine est différent, mais elles présentent des compétences dont le Maroc a besoin pour son développement.

Bref, un sujet aux contours très divers. Un défi pour le ministère des MRE qui a choisi ce thème. 

 

 Billet d'humeur : a-t-on évité l'annulation de la cérémonie ?

Ainsi donc cette journée du 10 août, cette fête nationale des MRE sera décentralisée "dans les différentes régions, préfectures et provinces du Royaume en présence de responsables des administrations et établissements publics et des collectivités territoriales." On reprend là les termes du communiqué du ministère chargé des Marocains Résidant à l'Etranger et des Affaires de la Migration.

En soi, l'idée est bonne. Elle correspond à la volonté de régionalisation mise en avant par le Roi, mais surtout à une réalité démographique et sociologique, car les MRE ne sont pas tous originaires de Rabat ou de Casablanca, loin de là, mais bien des différentes régions qui composent le Maroc, y compris les plus éloignées de la côte et les plus enclavées. Et c'est bien à cet échelon décentralisé qu'il faut aborder les questions qui se posent, car c'est bien là que les MRE retournent pour passer des vacances et ce sont bien ces régions qui ont besoin des compétences de leurs immigrés pour assurer un développement territorial.

Il reste quand même que cette décision, au demeurant fort pertinente, nécessiterait davantage d'explications de la part du ministère concerné. Ne serait-ce que pour couper court à différentes interprétations erronées qui deviennent vite des rumeurs pour se transformer en pseudo-réalités.

On se rappelle que la cérémonie d'honneur de la journée du 10 août 2014 avait été organisée à Rabat et qu'elle a été plutôt houleuse avec des MRE contestant et huant les autorités organisatrices de la manifestation (voir ici).  C'est en référence à cet épisode difficile pour le ministère que d'aucuns avancent aujourd'hui une interprétation de la décentralisation de la manifestation.

Si l'on suit cette hypothèse, le ministère aurait fait le choix de "disséminer" les participants sur différents lieux pour éviter un regroupement plus massif et plus propice à une expression de la contestation, que ce soit à Rabat ou à Casablanca. C'est plausible, mais la décentralisation de la manifestation trouve aussi ses arguments et son opportunité.

Alors, on verra bien au moment de faire l'évaluation de la journée du 10 août 2015. Mais, dans tous les cas, on ne peut pas faire le raccourci que d'aucuns n'hésitent pas à faire circuler en s'offusquant d'une "annulation de la cérémonie" : la décentralisation de la journée... lire la suite ...

Karima Diouri de maglor.fr

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