Yawatani

A l'issue de sa réunion du 14 décembre courant, dans le cadre de ses consultations annuelles avec le Maroc au titre de l'Article IV, le Conseil d'administration du Fonds monétaire international (FMI) a salué les politiques macroéconomiques menées par le Maroc qui ont conduit à la poursuite de l'amélioration de la situation macroéconomique du pays en 2015. Le Fonds a certes noté le progrès des comptes extérieurs et fiscaux sous l'effet de la baisse du prix du pétrole, mais il a alerté sur la dette publique, la hausse du chômage, les vulnérabilités liées au secteur agricole ou aux chocs externes, et sur les réformes fiscales et de la retraite.


Selon le FMI, la situation économique s'est améliorée cette année avec 4,7 % de croissance en 2015 après 2,4 % en 2014 du fait d'une bonne saison agricole et d'une reprise de la construction. Le fonds table sur un rythme de croissance moins soutenu de 3,1 % en 2016, dans l'hypothèse d'une année agricole moyenne. A noter que ce taux a été révisé à la baisse lors de cette mission, le fonds tablant jusque-là sur 3,7 % de croissance en 2016. En 2015, la croissance non agricole est restée peu vigoureuse dans les secteurs liés au tourisme et certains secteurs industriels comme le textile. Mais en 2016, c'est l'agriculture qui pourrait bien inquiéter du fait d'un début de sécheresse, information non prise en compte par la note du FMI.


A moyen terme, la croissance «restera vulnérable en raison des facteurs extérieurs et des risques géopolitiques», a indiqué le FMI , qui a souligné que le PIB agricole va se contracter en 2016 à -1,8%, après une hausse de 15,2% en 2015. Par ailleurs, le FMI relève que la baisse prévue du déficit budgétaire en 2015 est imputable à la chute des cours de brut et n'est pas « le résultat d'une politique budgétaire efficace », car le Maroc a profité de la baisse des cours de pétrole à l'international pour réduire sa facture des importations de produits énergétiques. La loi de Finances 2016 table sur une croissance modeste de 3%, la poursuite de la réduction du déficit budgétaire à 3,5% et une inflation maîtrisée à 1,7%. Dans ce sens, le HCP avait déjà prévu, en mois de juin dernier, dans son dernier budget économique exploratoire une décrue de la croissance économique marocaine à 2,16% du fait d'une production agricole moins bonne.


Le FMI s'en inquiète, surtout après l'alerte lancée l'été dernier par la Banque centrale. Car, si l'encours de la dette du Trésor est à moins de 64% du PIB, celui réel (englobant les emprunts garantis par l'Etat) atteint la cote d'alerte de 81%. Trop lourd pour les finances publiques. Alors que l'objectif de la politique de redressement des équilibres macro-économiques est de ramener le ratio de la dette du Trésor à 62% en 2018. Ce niveau reste loin de celui enregistré durant la période 2007-2012 qui se situait alors à 50,4% du PIB. En gros, il faudra changer de tactique et travailler davantage sur la croissance pour éviter des dérapages.


Pour les observateurs, l'Etat doit donner davantage confiance aux entreprises pour relancer l'investissement. L'effort repose uniquement sur le secteur public actuellement. Or, l'Etat ne peut pas continuer longtemps sur le même rythme d'investissement. Auquel cas, la dette va continuer son ascension et risque de devenir de moins en moins soutenable. Pour l'instant, elle se situe encore sous le seuil de tolérance admis par rapport au PIB. Elle pourrait basculer dans la zone d'alerte à moyen terme si les choses ne bougent pas.
D'autre part, les experts du Fonds ont mis le gouvernement marocain en garde contre une hausse du chômage, notamment celui des jeunes. Selon le Haut-commissariat au plan (HCP), le taux de chômage s'est établi à 10,1% au 3ème trimestre 2015 contre 9,6% en 2014. Le chômage parmi les jeunes est de 21,4% et presque 30% chez les jeunes diplômés. Dès lors, le Fonds a appelé le Maroc a revoir sa politique sociale et réformer le marché du travail et mieux gérer les dépenses publiques. Le FMI a noté dans ce cadre que les coûts élevés d'embauche et de licenciement sont considérés comme des obstacles importants à la création d'emplois.


En outre, l'accès insuffisant à l'information entrave le bon fonctionnement du marché du travail. Les systèmes d'éducation et de formation professionnelle doivent s'adapter de manière à réduire l'écart entre les qualifications de la main-d'œuvre et les besoins des entreprises. Si les secteurs à plus haute valeur ajoutée fournissent souvent une formation professionnelle afin de répondre à leurs besoins en matière de travailleurs qualifiés, il est nécessaire de procéder à une large réforme du système d'éducation pour améliorer la qualité de l'éducation et relever le niveau d'instruction global et le taux de scolarisation des filles.


Un autre dossier sur lequel le FMI insiste est celui de la retraite. La réforme du régime des retraites doit être une priorité afin d'assurer sa viabilité, insiste-t-il. Dans de nombreux pays de l'OCDE, 67 ans est en train de devenir le «standard» de départ à la retraite. Au Maroc, le gouvernement prend son temps pour trouver une solution médiane sur l'âge de départ à la retraite des fonctionnaires: 63 ans au lieu de 65 ans. La réforme paramétrique proposée par le gouvernement a pour objectif de prolonger la viabilité du régime (en d'autres termes, repousser le déficit) de 8 ans, jusqu'en 2022, et reporter l'épuisement des réserves à 2031 au lieu de 2022, ce qui donnerait du temps pour mettre en œuvre une réforme plus large. Le FMI a souligné que la réforme est urgente, étant donné la situation financière difficile de la CMR, et plus les changements paramétriques seront ambitieux, plus le rétablissement de la solidité financière de la caisse sera durable. « Il est important aussi de procéder à une réforme structurelle plus large afin d'élargir la couverture du régime de retraite aux nombreux travailleurs qui n'en bénéficient pas actuellement », souligne la mission du FMI.


La réforme fiscale figure aussi sur les recommandations du Fonds : « Il est important de réformer le système fiscal afin d'accroître la contribution des finances publiques à la croissance », insistent les services du FMI, qui ont souscrit aux réformes engagées par le Maroc depuis 2013, visant à rendre le système fiscal plus équitable à même de soutenir la compétitivité. Cependant, le Fonds a estimé qu'il serait souhaitable de ne pas abaisser les taux d'imposition avant de s'assurer que les gains attendus de l'élargissement de l'assiette de l'impôt seront réalisés. Après les mesures appliquées en 2014, notamment pour assurer l'imposition progressive des grandes entreprises agricoles, la loi de Finances 2015 introduit des mesures nouvelles, mais à portée limitée, pour réduire de taux de la TVA, ainsi que des mesures visant à mieux assurer le paiement de l'impôt par les travailleurs indépendants et les professions libérales. Les services du FMI ont indiqué que le Fonds est prêt à fournir une assistance technique pour la mise en œuvre de la réforme fiscale.


Pour les équipes du FMI, et en plus des éléments cités à prendre en considération par le Maroc, s'ajoutent d'autres facteurs qui peuvent peser sur le développement économique, tels que l'accès au financement, une éducation de qualité, l'efficacité des dépenses publiques et un bon climat des affaires. Et si des progrès ont été réalisés pour réduire la bureaucratie et combattre la corruption, le FMI attend avec intérêt de nouveaux progrès sur la promotion de la bonne gouvernance. Enfin, une meilleure couverture des soins de santé et la réduction de la pauvreté seront également indispensables pour parvenir à une croissance durable et plus inclusive. Le gouvernement marocain devra donc redoubler d'efforts pour relever ces nombreux défis.

Libération

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